Aller loin, ensemble…
Comme on ne s’y attendait pas, il se trouve que presque tous les dix-neuf pays du Golfe de
Guinée disposent ou réfléchissent sur une stratégie de gestion durable des ressources liées
à leurs mers : poissons, transport, pétrole, mines, tourisme, environnement, énergies
renouvelables… Initiatives éparses, en quête de coordination dans un environnement de
sécurité : la voie semble tracée, avec le ‘’Plan d’action pour l’économie bleue’’ de cette
région, esquissé et discuté du 28 au 30 Mai à Luanda en Angola.
‘’Comité interministériel’’ : la formule est revenue comme un leitmotiv concerté, dans les
exposés des représentants de divers États, qui présentaient les efforts fournis pour adopter
ou pour commencer à élaborer – dans la plupart des cas – une stratégie nationale de
l’économie bleue (EB). D’entrée de jeu, M. José Mba Abeso, Secrétaire exécutif de la
Commission du Golfe de Guinée, a placé les participants face à leurs responsabilités : «Le
succès du Golfe de Guinée dépendra de notre capacité à construire des compromis et à
mettre nos efforts en commun pour une économie bleue solidaire, durable et résiliente».
Pays hôte de l’atelier, et siège de la Commission du Golfe de Guinée (CGG, voir détails en
encadré), l’Angola a élaboré un document aligné à la fois sur les orientations mondiales
(Objectifs du développement durable de l’ONU – ODD), ainsi que sur la vision continentale
(Agenda 2063 de l’Union africaine). Fixé sur l’horizon 20230-2050, ce document repose sur
trois piliers : environnement, économie, développement social. Mme Tania Mandiga
Barreto, Directrice Nationale des Affaires Maritimes et de l’Économie Bleue, révèle que sa
conception a mobilisé les experts de dix-huit départements ministériels.
Brainstorming institutionnel pendant plusieurs années au Cameroun également, pour
obtenir enfin en décembre 2024 une loi dédiée exclusivement à la pêche et l’aquaculture.
L’objectif de la stratégie nationale de l’EB vise une «utilisation durable des ressources
maritimes et côtières, pour stimuler la croissance et assurer un développement durable»,
comme l’a expliqué M. Samuel Assam Otya’a, Point focal pour les organisations régionales
au ministère des Relations extérieures. Cette stratégie s’appuie sur quatre axes : promotion
de l’aquaculture, développement durable du tourisme côtier et marin, soutien à la recherche
scientifique, coopération régionale. Toutefois, elle ne peut se déployer efficacement que si
les conditions maximales de sécurité sont réunies, pour lutter contre la pollution des eaux et
des berges, la piraterie maritime, et la pêche dite INN (Illégale, Non déclarée, Non
réglementée).
‘’Hydro-diplomatie’’
« La voie de la libération économique de l’Afrique passe par la mer » ; en reprenant ces
propos de feu Félix Houphouët-Boigny, le Conseiller aux affaires maritimes du Premier
ministre du Congo, M. Itoua Vouwalatchani insiste sur la nécessité de mettre en commun les
moyens de plusieurs États pour jouir pleinement des retombées d’une gestion efficace des
ressources marines. Son pays place un immense espoir dans le Plan d’action 2026-2030 du
Fonds Bleu du Bassin du Congo, qui sera adopté en juillet 2025 avec un Plan national de mise
en œuvre ; dans la foulée, l’Institut des Hautes Études Maritimes ouvrira ses portes en
septembre 2025.
Tout à côté en République démocratique du Congo (RDC), l’on plaide aussi pour une gestion
concertée du fleuve Congo qui touche neuf pays d’Afrique. Le ministère de l’Intégration
Régionale en fait un défi vital, déclare un de ses hauts responsables, M. Roland Kamwaka,
dans une perspective qui met en œuvre le concept de ‘’hydro-diplomatie’’ : utilisation des
ressources hydriques pour un développement profitable à plusieurs pays, ainsi que pour la
médiation dans les conflits liés à l’eau. Dans cet esprit, la RDC est membre d’une demi-
douzaine d’organisations maritimes régionales, recoupant des zones d’Afrique centrale,
occidentale, orientale et australe.
Pour sa part, le Gabon assoit sa stratégie de l’EB sur un slogan évocateur : « République
gabonaise : océan d’opportunités ». La présentation faite par Mme Mba Fatoumata Maïga,
Conseiller aux affaires étrangères, insiste sur la création récente d’un Ministère de la Mer,
de la Pêche et de l’Économie Bleue. Les principales initiatives à exécuter rapidement
concernent le développement de l’aquaculture, le renforcement de la sécurité maritime, la
surveillance des eaux continentales, la modernisation des infrastructures, et le renforcement



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